Père Etienne Kern

Recteur

Portrait parut dans la revue du diocèse d’Autun. Réalisé par Anne Jacquemot.

Père Etienne, qui êtes-vous ?

Je suis prêtre du diocèse de Paris pour la Communauté de l’Emmanuel. J’ai 45 ans. Je suis originaire d’une famille nombreuse de Nancy de 8 enfants dont je suis le 7e.
Ma famille est chrétienne : deux de mes frères sont moines trappistes à l’abbaye de Sept-Fons et une de mes sœurs est bénédictine en Belgique. Mon père était préparateur en pharmacie et ma mère travaillait à la maison.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir prêtre ?

J’avais en moi ce désir depuis tout petit, notamment en voyant vivre mes frères aînés au monastère. A l’âge de 13 ans, j’ai participé au Forum des jeunes, animé par la Communauté de l’Emmanuel à Paray- le-Monial. Lorsque j’étais en Terminale, un prêtre de la Communauté est arrivé à Nancy et un groupe de jeunes s’est formé auquel je me suis intégré. Un prêtre m’a interpellé et le désir d’être prêtre est remonté à la surface au moment où j’ai envisagé un éventuel appel à faire partie de la Communauté. Il y avait cette coïncidence profonde entre ce que je portais en moi et mon désir d’être prêtre, comme une évidence qui m’a comblé de joie. Le choix de mes frères moines m’a aidé à me poser la question, mais ne m’a pas aidé à y répondre, dans le sens où ma vocation n’était pas un chemin d’imitation familiale mais un appel à ma liberté personnelle.

Qu’avez-vous fait ensuite ?

Après mon Bac, je pars à 18 ans à la Maison Saint Joseph, à Namur, pour une année de propédeutique, puis j’entre au séminaire de Namur pour le cycle de philosophie. Après 2 ans en coopération avec Fidesco à Porto-Alegre au sud du Brésil, où j’aide les habitants d’un bidonville, je reviens en France pour poursuivre le séminaire à Paris et étudier la théologie au Studium de l’Ecole Cathédrale puis au Centre Sèvres. Je suis ordonné prêtre du diocèse de Paris par Mgr Vingt-Trois en 2005. Pour mon 1er ministère, je suis nommé à Asnières et Bois-Colombes comme vicaire paroissial, notamment auprès des jeunes de la paroisse, du scoutisme et d’un collège-lycée catholique. En 2011, je retourne au Brésil dans une favela de Salvador de Bahia, comme curé de la paroisse Notre-Dame des Alagados (marécages en portugais). En 2017, je reviens pour une année sabbatique à Nazareth où, hébergé par la Communauté du Chemin Neuf, je me mets à l’école de Marie, de l’Annonciation, de la vie cachée de Jésus, de la spiritualité de Saint Charles de Foucauld. De retour Il prépare le Jubilé des 350 ans des Apparitions en France, je deviens curé en 2018 d’une paroisse de 3 clochers au sud d’Aix-en- Provence. Aujourd’hui, j’ai été appelé comme Recteur du Sanctuaire à Paray-le- Monial et délégué des séminaristes et des prêtres de l’Emmanuel pour l’Amérique latine.

Comment avez-vous reçu cet appel pour le Sanctuaire ?

J’ai reconnu la volonté du Seigneur dans cet appel à quitter Aix pour venir à Paray. Renoncer à la paroisse n’a pas été facile, et c’est un véritable bouleversement dans ma vie de prêtre. Toutefois, malgré une responsabilité accrue et tant de nouveautés à découvrir, je vis ce nouveau ministère dans une grande paix intérieure, heureux d’être là. Je suis nommé pour une durée de 3 ans, renouvelable.

Que retenez-vous de votre vie au Brésil ?

Je retiens le contact avec la pauvreté et d’être confronté à ma propre pauvreté. Au Brésil, j’ai trouvé un lien simple à Dieu pour vivre la foi. Cela se traduit par la joie, la louange, l’accueil des pauvres, qui sont nos maîtres, selon le mot de Saint Vincent de Paul. C’est un autre visage de l’Eglise, avec d’autres problématiques. J’ai fait l’expérience de l’unité profonde entre la vie de charité, la prière et l’annonce de la joie de l’Evangile. Là- bas, la paroisse est une véritable famille, on partage une communauté de destin, de joies et de souffrances très intenses. Dieu est une question de vie ou de mort pour les personnes, c’est vital. J’ai visité des centaines de maisons de la favela, partageant le quotidien des bahianais. Tout là-bas y est très intense, dans le mal (la détresse, la violence et parfois les meurtres) comme dans le bien (que de grâces et de sainteté). L’émotion est présente dans la relation entre les gens et avec Dieu. L’émotion, au sens littéral, c’est ce qui « émeut », donc ce qui « meut », ce qui peut faire bouger.

Que représente le sanctuaire du Sacré Cœur dans votre vie ?

C’est le lieu où j’ai rencontré le Seigneur, au cours d’une soirée d’adoration dans le Parc des chapelains à l’âge de 16 ans. J’ai vécu ce qui est dit du jeune homme riche : Jésus « posa son regard sur lui et l’aima. » C’est aussi le cœur, le lieu source de la Communauté de l’Emmanuel, là où est enterré Pierre Goursat, son fondateur. Ainsi, dans la favela où je vivais, les brésiliens étaient touchés par Pierre, sa simplicité, sa pauvreté. « C’est un pauvre. Comme nous ! » disaient-ils. Enfin, au Brésil, j’ai vu le rayonnement du Cœur de Jésus dans le monde : toutes les maisons ont l’image du Cœur de Jésus dans l’entrée.

Vous définissez votre vision pour le Sanctuaire en 3 mots : communion, réparation, mission. Pouvez-vous les expliquez ?

La communion, c’est la condition de la mission ! Sans communion, pas de mission. Ici à Paray, il y a une vraie diversité d’Eglise. Soit nous la vivons comme une juxtaposition, dans une indifférence plus ou moins teintée d’hostilité, soit nous nous recevons comme des frères et sœurs, au service de la grâce du lieu. C’est une formidable opportunité pour vivre l’altérité ecclésiale et l’édification mutuelle. Notre mission consiste à accueillir les pèlerins, chacun selon son appel, et leur transmettre le message du Cœur de Jésus, plus actuel et pertinent que jamais. Enfin, la réparation est une dimension du message de Paray. Le Seigneur aime mais n’est pas aimé. Consoler Jésus par notre amour, en nous offrant à lui dans l’adoration, la prière, la pénitence. Il s’agit de « rendre amour pour amour ». Ce sera le thème du grand jubilé du Cœur de Jésus, qui débutera en décembre 2023, pour fêter les 350 ans des Apparitions.

Quel lien peut exister entre Paray et le scandale des abus dans l’Eglise ?

Tous, nous sommes touchés et affectés par ce que nous découvrons. Nous souffrons pour l’Eglise, nous souffrons par l’Eglise. Et nous aimons l’Eglise. C’est pour ça que ça fait mal ! Je suis très sensible à cette question des abus. J’ai apprécié le travail de qualité du rapport de la CIASE, que j’ai lu intégralement ainsi que le livret des témoignages. Certes, c’est éprouvant, mais faire la lumière sur la vérité, si dure soit-elle, est libérateur pour avancer, comprendre ce qui se passe, identifier les mécanismes à l’œuvre pour s’en délivrer peu à peu. Le pape François parle d’une « culture de l’abus » au sein de l’Eglise. Sachons déceler où se nichent ces mauvais plis, ces mauvaises manières de faire qui ont permis que les abus de pouvoir, de conscience et sexuels aient lieu dans l’Eglise et aient été aussi mal gérés. Il y a encore bien du chemin à faire. Or, Paray a quelque chose à dire sur ces scandales, pour nous aider à faire face, nous tous catholiques, et à traverser cette épreuve. Notre souffrance rencontre celle du Cœur de Jésus : Jésus se plaint des offenses d’amour de la part de ceux qui lui sont consacrés ! Alors, nous pouvons entrer dans cette souffrance du Cœur de Jésus, avec tout ce qui traverse nos cœurs : honte, colère, découragement … et y trouver la paix du cœur, en nous unissant à sa souffrance, en nous offrant à lui, en rendant amour pour amour. En réparation d’amour.

Que gardez-vous au cœur lorsque vous priez dans la chapelle des apparitions ?

Pour moi, la grâce du Cœur de Jésus est une grâce de consolation. C’est aussi une grâce de guérison du cœur. Comme Marguerite- Marie, mon cœur est transformé en étant uni à celui de Jésus. Ma prière est que l’Esprit agisse dans le cœur des pèlerins. Quand les gens viennent ici, Dieu agit en eux de façon particulière. Il s’agit de servir la grâce du lieu auprès des pèlerins qui viennent ici ou envers ceux vers qui nous allons parler du Cœur de Jésus. Paray rayonne dans le monde par l’Apostolat de la prière, la Garde d’honneur, les multiples dévotions au Cœur de Jésus, la vénération des reliques, par notre internet, par les sessions d’été de la Communauté de l’Emmanuel, par les innombrables témoignages de vie transformée.

Comment percevez-vous le diocèse d’Autun ?

Depuis mon arrivée, je suis vraiment touché par la bienveillance et la confiance de ceux qui m’accueillent dans le diocèse. Quelle joie d’être bien accueilli, avec une grande confiance et le désir de travailler ensemble. Ce qui se passe autour de la préparation des JMJ, avec tous ces jeunes du diocèse venus ici est un beau signe d’espérance que Paray prend toujours davantage sa place de sanctuaire diocésain ouvert à tous. Ces jeunes s’approprient le message du Cœur de Jésus, pour s’en faire les porte-voix auprès des jeunes du monde entier à Lisbonne et, à leur retour, dans les différentes paroisses du diocèse.

Avez-vous des loisirs ?

J’aime marcher. Le lundi, mon jour de repos, je fais des randonnées dans la belle campagne bourguignonne. J’aime aussi beaucoup lire (romans, BD, …) et aller au cinéma, même si j’ai un peu moins de temps en ce moment ! J’écoute des podcasts de Radio France : c’est ma façon d’écouter le monde sans filtrage.

Votre message aux diocésains de Saône-et-Loire ?

Venez et invitez-nous ! « Venez » à Paray, boire aux sources vives de la miséricorde. Et « invitez-nous », car nous pouvons également nous déplacer dans les paroisses du diocèse pour présenter les Apparitions de Paray et parler des merveilles du Cœur de Jésus.

La présentation vidéo du père Etienne Kern lors de sa messe d’installation – Fêtes de sainte Marguerite-Marie 2021

 

 

Ses interventions (enseignements etc.)