Depuis son origine, l’Église conserve et vénère les reliques des saints. Cette tradition témoigne de la foi dans la communion des saints et dans la résurrection des corps.

«En attendant la Résurrection reposent dans cette châsse les ossements de sainte Marguerite-Marie». Cette inscription qu’on pouvait lire au pied de la châsse de la Sainte de Paray, dans la chapelle des Apparitions, nous donne d’emblée une des dimensions essentielles de la vénération des reliques, pratiquée depuis les origines dans l’Eglise.

 La résurrection de la chair

Le culte des reliques dans l’Eglise est opposé au «fétichisme» qui est une idolâtrie. Ce culte est une expression particulièrement éloquente d’un des articles de notre foi spécifique à l’héritage judéo-chrétien : «Je crois en la Résurrection de la chair» (symbole des Apôtres). C’est une expression de notre foi en l’Incarnation du Verbe qui se déploie dans le mystère glorieux de sa Résurrection. Le «réalisme» de l’Incarnation ne disparaît pas dans la splendeur de la Résurrection, bien au contraire.

Jésus ressuscité se manifeste à ses disciples dans ce même corps qu’ils lui ont connu naguère, ce corps qui a été crucifié : « Voyez mes mains et mes pieds ; c’est bien moi !» (Lc 24,39) ; «Porte ton doigt ici : voici mes mains ; avance ta main et mets-la dans mon côté » (Jn 20,27). Nous croyons donc aussi que nos propres corps ressusciteront à la fin des temps, lors du deuxième Avènement de Jésus, et qu’ils seront unis à nouveau à notre âme immortelle[1]. Or, lorsqu’une personne a été déclarée sainte par l’Eglise, cela signifie que nous croyons qu’elle ressuscitera pour la «vie éternelle» (cf. Mt 25, 46) et donc que son corps actuellement vénéré est promis à la Gloire des «justes (qui) resplendiront comme le soleil dans le Royaume de leur Père» (Mt 13, 43). En contemplant ou en touchant, ne fût-ce qu’une parcelle du corps d’un saint reconnu tel par l’Eglise, on participe déjà par la foi à la Gloire de la Résurrection «au dernier jour» (cf. Jn 6, 40) qui doit se manifester aussi par ce même corps devenu glorieux.

Membres du corps du Christ

Ce qu’il est important de comprendre, c’est que la vénération des restes d’un saint dérive – et donc est inséparable – du culte rendu au Corps ressuscité et glorifié de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Les saints, et d’ailleurs tous les baptisés, sont comme des «humanités de surcroît» pour le Christ, comme un «prolongement» de son Incarnation ; ils sont membres vivants du Corps du Christ, qui est l’Eglise.

Accueillir la vie même de Dieu

 «Glorifiez donc Dieu dans votre corps » (1Cor 6, 20). «Le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c’est vous» (1Cor 3, 16). «Votre corps est un temple du Saint Esprit, qui est en vous» (1Cor 6, 19). Ces appels de l’Apôtre sont destinés à tous les baptisés, et les saints y ont répondu de toute la force de leur amour. A travers la vénération de leurs restes, ce n’est pas simplement un exemple qui nous est offert, mais une communication de la grâce qui a plus particulièrement été la leur. Saint Grégoire de Nazianze dit que «les corps des Martyrs ont le même pouvoir que leurs saintes âmes»[2]. Saint Basile nous dit que «celui qui touche les os d’un Martyr participe à la sainteté et à la grâce qui y réside». On comprend dès lors le prix très précieux qu’on attache à des objets ayant été en contact avec un saint ou avec ses reliques. A ce propos, il nous faut citer un passage étonnant de l’Ancien Testament, relatif au prophète Elisée[3]: «Elisée mourut et on l’enterra… il arriva que des gens qui portaient un homme en terre… jetèrent l’homme dans la tombe d’Elisée et partirent. L’homme toucha les ossements d’Elisée : il reprit vie et se dressa sur ses pieds» (2 R 13, 20-21).

Un culte hautement recommandé

  1. Jounel (dictionnaire Catholicisme) écrit que «le plus grand honneur que puissent recevoir les reliques d’un martyr ou d’un autre saint consiste à être déposées dans la table d’un autel ou sous cette table, lors de sa dédicace. Lorsqu’il s’agit d’un martyr, le symbolisme révèle toute sa profondeur ». Et citant Saint Ambroise : «Que les victimes triomphantes prennent place là où le Christ s’offre comme victime. Sur l’autel Celui qui a souffert pour tous et, au dessous, ceux qu’il a rachetés par sa Passion »[4]

La communion des Saints

Le culte des reliques nous enracine aussi davantage en notre foi en la «communion des saints» (Symbole des Apôtres), en notre appartenance à l’immense famille de Dieu. Par la présence de leurs restes parmi nous, ces frères et sœurs en humanité qui ont déjà en leur âme atteint la «Cité permanente» (cf. Hb 13, 14) sont comme un «pont» reliant Terre et Ciel, notre état actuel de pèlerins et notre Gloire à venir. Par eux, le Seigneur nous manifeste – de manière beaucoup moins essentielle, bien entendu, que par les sacrements – à quel point il est «avec (nous) jusqu’à la fin du monde» (Mt 28, 20).

Père Jean-Rodolphe Kars – © Sanctuaire, tous droits réservés.

[1]La foi en la résurrection de nos corps, alimentée par la vénération des reliques des Saints, est, bien entendu, incompatible avec le mythe de la réincarnation qui séduit beaucoup de gens à notre époque.

[2]Aux origines de l’Eglise, la piété des fidèles s’attachait alors uniquement aux reliques des Martyrs qui étaient au sommet de la «hiérarchie» des saints à cause de leur parfaite conformité à la Passion et à la Mort du Sauveur

[3] Prophète renommé pour ses nombreux miracles.

[4] Saint Ambroise, à l’occasion de la translation des reliques de deux célèbres martyrs, Gervais et Protais.